Les nouveaux couples confinés ensemble

#JOUR32… Cette semaine on part au Québec pour parler avec François Renaud, sexologue, psychothérapeute, directeur et superviseur clinique à Montréal.

Il est spécialiste en thérapie de couple et partage avec nous aujourd’hui des réponses à la question des nouveaux couples qui ont pris la décision de vivre le confinement ensemble.

Vous pouvez le retrouver sur son site web, ainsi que suivre ses conseils sur son blog, ou encore sur sa chaîne YouTube.

UNE NOTE IMPORTANTE:

Puisque le sujet de violences conjugales a été abordé par François lors de notre échange, nous avons réservé une section de l’article aux recours à notre portée en France, en fin de page.


GCC: Certains nouveaux couples ont pris la décision de se confiner ensemble sans jamais avoir cohabité. À quoi faut-il faire attention? Quels conseils?

FR: Évidemment c'est une situation assez particulière, que de décider d'habiter ensemble en cette période. Il y a des gens qui ont pris des baux ensemble rapidement parce qu'ils ne savaient pas combien de temps ça allait durer, ou tout simplement quelqu'un déménage, temporairement du moins, chez l'autre.

Il peut y avoir un choc assez important, surtout quand ça ne fait pas longtemps qu'on se connaît. On va apprendre à connaître la personne assez rapidement. C'est un peu comme aller en voyage avec un ami. C'est à ce moment-là qu'on découvre les petits défauts et les traits de personnalité qui peuvent nous irriter. Alors c'est une façon accélérée d'apprendre à connaître l'autre. 

Peut-être que dans un nouveau couple qui n'a jamais cohabité les gens vont faire un peu plus attention pour éviter de déplaire à l'autre. Ils vont vouloir être plus dans un jeu de séduction. Ce qui peut-être bénéfique. En même temps peut-être qu'on cache un peu notre authenticité et notre intégrité. Mais c’est une chose qu'on fait de toute façon dans un début de relation. Ce n'est pas recommandé, mais c'est souvent la façon dont les gens vont réagir au début dans un couple. 

Donc il faut aussi avoir des attentes réalistes. Rencontrer quelqu'un dans son quotidien, dans sa routine c'est pas la même chose que d'aller sur des ‘dates’ de temps en temps.

Quand cette personne-là se présente à un restaurant, où elle a pris le temps de se préparer, finalement elle se présente sous son meilleur jour. 

Maintenant en cohabitant de suite, on découvre cette personne dans tous les recoins de sa vie personnelle. Et ça peut être un choc pour certains. 

Il y a des gens qui vont bien vivre cette réalité. Et il y a d'autres gens qui vont bien moins la supporter et vont réaliser que ce n'est peut-être pas un partenaire avec qui on a envie d'entretenir une relation à long terme.

GCC: Une dernière remarque ou conseil en ce qui concerne les nouveaux couples qui ont décidé de cohabiter pendant le confinement?

FR: Oui! C’est d'avoir un peu de compassion et d'empathie, autant envers soi-même, de nos insécurités de nos craintes et du stress qu'on est en train de vivre globalement, puis aussi avoir la capacité de prendre du recul. On ne vit pas tous la situation de la même façon.

Peut-être que notre partenaire vit ça de manière plus relaxe, ou au contraire vit ça plus difficilement. Il y a des gens qui ont perdu leurs revenus ou une partie. D'autres continuent à travailler, et peuvent même avoir une surcharge de travail.

Il faut prendre un peu de recul et apprendre à gérer ses émotions pendant ce confinement. 

Puis il est important aussi de prendre le temps pour soi pour faire des activités à part, sans les autres. Même dans un petit appartement on peut bouquiner par soi-même, regarder une série tout.e seul.e ou cuisiner, etc.

Il faut faire quelque chose qui va nous ressourcer aller faire un jogging si c'est encore possible dans votre région particulière. Prendre le temps de prendre soin de soi encore plus, quand globalement au niveau de la santé mentale, on est tous un peu plus stressés et fragiles par rapport à ces éléments-là.

Aussi il faut faire attention à ne pas déménager avec n'importe qui et rester vigilant. La violence conjugale, ça existe. 

Si on se retrouve avec quelqu'un en qui on n’a pas confiance, qui a peut-être certains traits de violence psychologique, émotionnelle, ou physique même, on peut se retrouver dans une situation assez difficile. Il faut quand même prendre en considération cette situation-là.


Des ressources vers lesquelles se tourner en cas de violences conjugales

Il est important ici de parler des recours à notre disposition pour signaler ces violences, qu’on en soit victime ou témoin.

Si vous êtes témoin, NE FERMEZ PAS LES YEUX, donnez l’alerte. Vous êtes en fait encore mieux placé que la victime pour intervenir sur ce plan car vous pouvez le faire en toute discrétion dans la mesure où la personne victime des violences sera sûrement surveillée de beaucoup plus près par son agresseur. Non, il n’est pas évident de passer l’appel soi-même quand on est confiné avec une personne violente dans un espace restreint.

S’il vous plait, si vous êtes témoin, observez la scène et notez le plus de détails possibles à donner ensuite à la police. Vous pourriez sauver une vie

Dans le doute, alertez les autorités. Si vous avez à vous poser la question, c’est déjà que la situation suggère un problème. Ce n’est pas vous mêler de ce qui ne vous regarde pas, c’est porter assistance à une personne potentiellement en danger!

Sans être physiquement témoin, mais si vous connaissez quelqu’un à risque, ou dans une situation difficile, maintenez le contact, et sonnez l’alerte.

Si vous-même vous êtes victime, ne restez pas dans le silence ou dans la souffrance. La première chose à faire est de mettre de la distance physique entre vous et votre agresseur. Si vous pouvez vous réfugier (avec vos enfants si vous en avez) chez de la famille, des amis, ou des voisins, faites-le. Ne vous souciez pas d’être un fardeau pour vos hôtes, votre sécurité et votre vie est plus importante que l’inconfort que vous pouvez causer!

En temps de crise, le cerveau peut facilement se réfugier en mode auto-pilote et les états d’angoisse et de choc peuvent prendre le dessus. Mettre de la distance physique vous permettra donc de vous reposer en sécurité et ainsi de ne plus être en constant état d’alerte.

Il est extrêmement important de vous extraire de cette situation physiquement.

Si vous êtes constamment surveillé.e, oubliez les sacs ou valises. Profitez d’un moment ou votre conjoint.e n’est pas là, est sous la douche, ou autre pour partir (avec les enfants).

Si vous êtes dans l’impossibilité de partir, il faut agir tout de même (et c’est émotionnellement aussi extrêmement difficile), et passer l’appel ou envoyer le signal aux autorités d’une autre manière. 

Dans des cas de violences conjugales, les relations sont souvent codépendantes et les violences peuvent être non-seulement physique, mais aussi et surtout psychologiques. Vous pouvez par exemple ressentir de la honte ou de la culpabilité, ce qui freine bien évidemment la prise d’action et votre propre prise en charge. Ne réfléchissez pas. Agissez. 

C’est un moment de stress extrême, mais il est nécessaire. On en parle trop peu mais la violence qu’il faut se faire pour passer ce coup de fil est quelque chose que, et heureusement, bien peu de personnes connaissent ou peuvent comprendre. C’est pourtant un processus essentiel pour sortir d’une relation abusive et reprendre le contrôle sur sa propre vie.

Votre conjoint.e ne changera pas, votre situation ne s’améliorera pas, tant que vous resterez dans cette relation. Si vous jugez que votre situation n’est pas une urgence, dites-vous bien que le moment où ça en sera une, il sera peut-être trop tard pour signaler votre détresse. Agissez maintenant et courage.

LES RECOURS en France:

  • Mettre de la distance physique quand vous le pouvez.

  • Appeler le 17 si vous pouvez le faire discrètement.

  • Envoyez un SMS au 114 avec votre nom, votre emplacement, et signalez que vous avez besoin d’aide.

  • Appelez le 3919 si vous pouvez le faire discrètement.

  • Visitez le site Arrêtons Les Violences pour effectuer un signalement en ligne.


En pharmacie, vous pouvez aussi prononcer les mots “masque 19” qui donneront le signal aux pharmaciens de contacter les autorités. À ce stade restez jusqu’à l’arrivée des policiers.

Sachez que la police ne peut pas refuser de se déplacer. Si vous n’avez personne chez qui aller, vous serez plus en sécurité au poste qui saura vous guider vers un hébergement temporaire pour vous remettre sur pied et vous permettre de formuler un plan d’action pour votre futur.

N’oubliez pas que malgré le confinement, vous êtes en mesure de vous enfuir, et que les mesures seront prises pour que vous soyez en sécurité.


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